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Chroniques
Francis Poulenc
musique de chambre
Lorsqu’il s’entretient avec Francis Poulenc (1899-1963) au micro de la Radiodiffusion française, entre octobre 1953 et avril 1954, Claude Rostand ne manque pas d’interroger le compositeur des Biches sur son rapport à la musique de chambre. Est-elle pour lui « musique-confession », « musique-divertissement », Gebrauchsmusik – comme les Allemands appellent cette « musique d’utilité », voisine de celle qui servait d’ameublement au facétieux Satie – ou encore une occasion de résoudre des problèmes d’écriture, de sonorités ? Poulenc répond :
« La musique de chambre est, chez moi, comme vous le constatez justement, un phénomène intermittent. C’est, tantôt un besoin réel qui me pousse à l’écrire, tantôt une occasion que m’offre un virtuose. En ce qui concerne mes trois premières sonates pour instruments à vent, il est hors de doute que je les dois à mon seul instinct. J’ai toujours adoré les instruments à vent, que je préfère aux cordes, et ceci, tout naturellement, sans tic d’époque. Bien sûr, L’Histoire du Soldat et les pièces pour clarinette seule de Strawinsky [sic] ont développé en moi ce goût, mais je l’avais déjà enfant. […] À reconsidérer ces petites sonates, qu’on commence à jouer un peu partout, je me prends à les aimer plus qu’autrefois, car elles sont, à coup sûr, bien plus authentiques que ma Sonate pour piano et violon, par exemple. Bien écrites pour les vents, elles gardent une certaine verdeur qui n’est pas sans rapport avec les premières toiles de Dufy » (in J’écris ce qui me chante – textes et entretiens, Fayard, 2011 [lire notre critique de l’ouvrage]).
On trouve réunies ici les sonates pour violoncelle (esquissée en 1940, achevée en 1948), violon (1943), flûte (1957), hautbois ou encore clarinette (1962) qui dialoguent avec un piano, ainsi que celles pour deux clarinettes (1918), pour cor, trompette et trombone, et pour clarinette et basson (1922). Les Trio pour piano, hautbois et basson (1926), Sextuor pour piano, flûte, hautbois, clarinette, basson et cor (1932/39), Villanelle pour piccolo et piano (1934), Élégie pour cor et piano (1957), Sarabande pour guitare solo (1960), de même qu’Un joueur de flûte berce les ruines (1942) complètent ce programme français donné par le London Conchord Ensemble – qui représente l’intégralité de la musique de chambre de Poulenc annoncée par l’éditeur… si l’on excepte les pièces pour deux pianos ou piano à quatre mains.
Formation à géométrie variable, ce dernier se compose de jeunes artistes largement reconnus, que ce soit par leur travail solistique ou par leur implication au sein d’orchestres variés (BBC Symphony Orchestra, Royal Opera House Orchestra, Scottish Chamber Orchestra). Depuis sa première prestation au Wigmore Hall en octobre 2002, l’ensemble installé à Londres explore un répertoire chambriste traditionnel et contemporain, proposant ainsi un amalgame de chefs-d’œuvre bien connus et de découvertes.
Autour du piano nuancé et expressif de Julian Milford – connu pour avoir accompagné les barytons Thomas Allen, Toby Spence et Christopher Maltman –, relevons la présence de Barnaby Robson, Maximiliano Martin (clarinette), Maya Koch (violon), Thomas Carroll (violoncelle), Daniel Pailthorpe (flûte), Emily Pailthorpe (hautbois), Andrea de Flammineis (basson), Nicholas Korth (cor) et de quelques invités : Richard Hosford (clarinette), Philippe Schartz (trompette), Byron Fulcher (trombone) et Tom Elis (guitare).
LB